Aider au regroupement et à l’unité des différents groupes de Gilets jaunes sur Lyon et le Rhône, c’est ce à quoi le Journal de bord abrité sur le blog de Temps critiques a participé depuis deux mois parce que ce « groupe non-groupe » (il ne constituait pas un groupe de Gilets jaunes à proprement parler) a été à l’interface de groupes qui ne se reconnaissent pas dans le groupe Lyon-centre, mais qui ont pensé, dans la décrue du mouvement, la nécessité de retrouver l’unité du tous Gilets jaunes. Cela a débouché sur une AG regonflée (environ 300 personnes au lieu d’à peine 150) et à deux Commissions Action successives avec 40 personnes des différents groupes.
Cet effort a culminé avec la réunion de préparation de l’AG interdépartementale à laquelle nous avons été conviés et qui s’est terminée par un accord de principe entre les différents groupes. Dans les faits, le choix fait à la réunion de préparation, d’une alternance hebdomadaire entre AG Lyon et AG départementale a conduit à laisser chacune de ces assemblées à des groupes plus guère représentatifs que d’eux-mêmes et s’excluant mutuellement, chacun transformant son AG respective en un pré carré. Donc, finalement, reproduisant ce qui était reproché au groupe Lyon-centre : à savoir, une confiscation du mouvement.
Les conflits au sein de l’AG Bourse tant qu’elle est restée unitaire, indiquaient encore une certaine vitalité de celle-ci pendant la période où nous avions œuvré, avec d’autres, à sa mise en autogestion. Or, le projet du groupe Lyon-centre pour ce lundi 15 juillet était par contre clair : museler toute opposition à la transformation de l’AG en une caisse enregistreuse des orientations et décisions prises à Monceau-les-Mines par l’Assemblée des assemblées et, via le journal Le Progrès, se présenter comme le seul référent du mouvement pour l’extérieur, dans la mesure où il transformait son rond-point imaginaire de l’hôpital de la Croix-Rousse en un « QG » du mouvement.
Certains d’entre nous ont pensé très tôt que la forme assemblée, malgré l’existence dès l’origine de l’assemblée de Commercy, n’était pas la forme adéquate d’un mouvement qui n’a pas pris sa source en milieu urbain et qui a de suite créé ses propres lieux d’expression (ronds-points, cabanes), et d’ailleurs quand le mouvement est devenu plus urbain toutes les villes n’ont pas repris la forme assemblée, ou quand elle a été reprise ce fut tardif comme à Bordeaux (26 février) ou à Montreuil, qui semble avoir été la seule assemblée « parisienne ». À Lyon, par exemple, seul le nombre imposant (jusqu’à 5-600 personnes) et la variété des participants avec de nombreuses personnes arborant le gilet à l’intérieur de l’AG, empêchait qu’elle ne se transforme en assemblée type « Nuit debout ». Il a donc été possible de résister aux mises en commissions spécialisées et aux pratiques d’horizontalité autoritaires (tribune, ordre du jour fixé à l’avance, tour de paroles) pour faire place à la discussion et à la confrontation au sein d’une assemblée désormais mise en « autogestion ». Dans cette mesure, ce fut un creuset utile et de toute façon la répression étatique démantela dès janvier les lieux autonomes d’expression et d’action du mouvement.
De leur côté, les groupes de l’interdépartementale se sont avérés incapables, la semaine dernière, d’ouvrir à tous leur propre AG, malgré la conscience de leur isolement (le refus de Lyon-centre de les rejoindre sur l’opération anti-Macron de Lyon).
L’indifférence soudaine de tous les groupes par rapport à une Commission Action pourtant centrale était révélatrice de cette évolution. Une Commission Action devenue inutile pour les premiers, car tout aurait été dit à Monceau-les-Mines (le programme de l’été) et qu’à Lyon l’action c’est maintenant seulement la prise imaginaire d’un rond-point afin de s’y livrer à la pétitionnite contre la privatisation d’AdP ; inutile aussi pour les seconds pour qui « la résistance » passe par une organisation affinitaire de petits groupes en direction d’actions ciblées. Dans les deux cas, le caractère de masse du mouvement était sacrifié.
Devant ce constat, nous ne pouvons que nous tenir en réserve d’un mouvement, au moins à Lyon et dans le Rhône, qui n’a plus qu’un lointain rapport avec ce qu’il a été. Le souvenir de ce que nous y avons vécu est encore trop fort et présent pour le laisser entacher par des situations désagréables de tension ou d’indifférence calculée.
Cela ne préjuge pas de ce qui peut se passer ailleurs et par exemple les actions du 14 juillet à Paris ne sont pas négligeables et accréditent l’idée que des soubresauts sont encore possibles. Nous y participerons autant que possible.
Gzavier et Jacques