Donc il y a eu avant le 10, puis il y a eu le 18 et enfin le 2 octobre !
La partie s’est donc jouée en trois sets avec un long échauffement. Est arrivé ce que nous craignions. Tout a été bloqué mais pas ce que l’on pouvait attendre. Enfin, pas ce que nous aurions aimé voir advenir
Il est tout à fait possible de tenir un discours type ultragauche. Nous étions trop faibles, les syndicats étaient trop forts. C’est tout à fait exact mais pour autant insatisfaisant. Nous pourrions très bien nous en tenir là, en se disant que la prochaine…
À propos du 10 les tentatives de blocage ont échoué. Monsieur Retailleau avait prévu le coup et préparé ses troupes. À Strasbourg les chars étaient de sortie.
Vu la longue préparation, le long échauffement qui précéda ce 10/09 on pouvait s’attendre à ce qu’un certain nombre de coups fourrés puissent avoir lieu ci et là.
À Strasbourg les blocages de rue ont rapidement disparu, le rapport de force était trop grand sauf à un endroit où il avait pris la forme d’un déménagement de meubles d’un côté de la rue et inversement. au grand plaisir des automobilistes semble -t-il.
À Cherbourg c’est la façon américaine du piquet de grève, ne jamais s’arrêter sur le passage piéton qui fut utilisée.
À Toulouse cela donne ça : https://feuilles.net/jai-bloque-toulouse/
Il y avait un rassemblement des décoloniaux, antiracistes, féministes … Avec une prestation d’une chorale du même tonneau…
Ça chantait à l’unisson, et j’avais du mal… quelque chose de militaire presque… J’imaginais dans ma tête des variations des détours, mais là, rien, la route était droite…pas moyen de s’échapper… personne ne se serait risqué à tenter une deuxième voie… la bonne cinquantaine de personne qui chantaient avaient la mine réjouie, se souriant mutuellement… il y avait un vrai plaisir… moi ça me faisait presque peur…
La France des militants, ou les militants en France restent dans la logique de l’affrontement direct et non dans celle de l’évitement. Sans pour autant à appeler à remplir les prisons. Par ailleurs le passage par la prison continue à être considéré comme honteux et non pas comme une école politique, comme c’était souvent le cas au début du siècle dernier. La tactique du chat et de la souris peut paraître moins héroïque, mais souvent plus efficace.
La question des réseaux sociaux
Quelle fiabilité peut-on leur accorder, d’une part ? D’autre part cette caisse de résonance que —leur furent les médias-a-t-elle joué un rôle d’amplification, d’effraiement, qui a surtout servi le Ministre de l’Intérieur qui a pu montrer qu’il maitrisait la situation. Ces réseaux sociaux sont-ils autre chose qu’une façon de s’exprimer sans risque.
Cet aspect des choses ne change rien à la réalité du mécontentement social qui profitant de l’absence du pouvoir central tend à s’exprimer partout.
Il est aussi possible de faire comme Serge Quadruppani, dans LundiMatin, botter en touche sur Gaza cette virée collective accumulant les non-sens. Nous préférons voir, aimer, encourager ce qui se passe en Serbie. Comment expliquer le silence français qui entoure ces luttes qui durent depuis un an bientôt. La réponse ne-réside-t-elle pas dans le refus de la conquête du pouvoir comme telle et par une façon de lutter horizontale sans leader autoproclamée ?
Car ici comme ailleurs la question fondamentale ici est de savoir quelles sont les capacités de mobilisation ensemble des classes moyennes et populaires.
Les unités de production, que l’on désignait autrefois sous le nom d’usines, ont profondément changer de nature. Le travail effectué en équipe qui créait simultanément des liens de solidarité n’existe plus. Dans ces « usines » chaque opérateur est seul devant sa machine ultra-automatisée. Seul les rassemblent la même dépendance au salaire. Par ailleurs, les emplois dans ce qui a nom d’emploi public est de plus en plus important.
Il faut examiner les chiffres. On s’aperçoit alors que les syndicats ne sont présents que dans les structures où ils représentent une forme efficace d’assurance professionnelle.
Depuis 2020, dans l’Educ Nat, les commissions paritaires chargées d’organiser les changements professionnels comme les mutations ou régler les conflits ont perdu de l’influence. Donc les syndicats qui les composaient ont perdu de l’importance, donc des capacités de mobilisation.
Le nombre d’auto-entrepreneurs a dépassé les deux millions d’individus qui autrefois auraient été des prolos comme les autres et qui sont aujourd’hui des travailleurs auto-exploités.
Reste dans tout ce milieu de gauche le remords plus quelque regret de n’avoir pas reconnu le mouvement des ronds-points comme quelque chose de fondateur dans la lignée des révolutions des places.
Alors quoi de neuf ?
Pierre Sommermeyer
première parution : https://divergences.be/spip.php?article4334