Retour sur le débat « une société sans argent ? »

Ci-dessous quelques remarques sur un débat ayant eu lieu à la Parole Errante (Montreuil) le 3 octobre 2015 portant sur « une société sans argent ? ». A cette occasion Bruno est intervenu pour développer un point de vue en lien avec celui de la revue Temps critiques.


Du débat du 3 octobre, « une société sans argent ? », j’en retire des aspects positifs (tentative de faire ce débat, réunion des intervenants ayant une vision assez différente sur le sujet) et des aspects négatifs (manque de coordination entre les intervenants ceci à cause d’une certaine opposition entre ces derniers ; en ce qui me concerne je ne suis pas très habitué à ce genre d’exercice),

Nous étions quatre intervenants : De Mattis, Eric du courant Jappe, un autre intervenant de dernière minute.

Le premier intervenant De Mattis a résumé le contenu de son texte « Qu’est-ce que l’argent ? Rien La lutte des classes : Tout ». Pour lui, le krach financier de 2008 et la question de la dette des états ont mis la question de la monnaie au centre de l’attention du public. Les questions seraient lâchées : argent/dette, monnaie européenne ou nationale ou parallèle. Il fait un point sur Syriza, ses alliances avec les souverainistes, le rapprochement du FN avec Syriza. Il a aussi fait une critique des monnaies locales qui vont dans le sens de F.A Hayek qui prône une monnaie émise par des opérateurs privés. Il établit un lien entre « l’anti capitalisme » des défenseurs de la monnaie parallèle et l’ultra libéralisme. Sur l’argent, De Mattis nous dit que c’est de la dette . Créer autant d’argent qu’on veut engendre de l’inflation. La valeur qui circule dans l’économie capitaliste repose sur l’exploitation du travail. Il parle aussi de crise de la valorisation. De Mattis termine en disant que la seule dynamique pouvant changer le rapport social est la lutte des classes.

J’ai été le deuxième intervenant. En préambule, j’ai souligné que la question de la rupture avec l’argent a souvent été débattue dans les 70/80 par des groupes issus de l’ultra gauche. Ces milieux ont exhumé des textes des gauches hollandaises sur les bons de travail ou voir une critique de l’échange dans la gauche italienne tout en ayant une vision d’un communisme de production. J’ai indiqué de quelle façon le sujet avait été abordé dans le courant libertaire. Dans mon préambule, j’ai mis l’accent sur le rôle du capital fictif aujourd’hui en disant celui-ci s’exprime de façon structurelle renvoyant au livre Crise financière et capital fictif de JG et JW. Ensuite, j’en suis venu à mon texte. J’ai fait l’erreur de trop « coller » à mon texte en le lisant alors qu’évidemment il y a des choses qui passent plus difficilement à l’oral. De Mattis m’a demandé d’écourter, cela m’a quelque peu déconcentré et j’ai donc résumé les deux dernières pages de mon texte.

Le troisième intervenant était Eric qui défend des positions proches de Jappe. Il a repris le texte de Norbert Trenkle « Le travail à l’ère du capital fictif ». Il reprend que chez Marx la marchandise est la »forme élémentaire » de la richesse capitaliste. C’est par l’entremise des marchandises et de l’argent que les individus établissent le lien avec la richesse qu’ils produisent. La valeur d’usage n’est qu’un moyen en vue de la réalisation de la transformation du travail abstrait représenté dans la marchandise. L’argent est la marchandise universelle, l’incarnation de la richesse abstraite de la société capitaliste. Il nous rappelle que c’est le travail qui produit la valeur. Il s’appuie sur la théorie de la valeur/travail de Marx et que la richesse capitaliste s’effectue par la marchandise. Ensuite, Eric nous parle du double caractère du travail : un côté concret qui produit la valeur d’usage et un côté abstrait qui produit la valeur. Il insiste sur la marchandise/force de travail en tant qu’objet d’échange que le propriétaire de la force travail met sur le marché pour obtenir d’autres marchandises. Ensuite, il nous dit qu’avec la fin du boom fordiste, avec le développement de l’automatisation et des NTIC, le capital a eu tendance à rendre superflue la force de travail. Pour Eric, la valorisation du capital repose sur l’exploitation de la force de travail. L’inessentialisation de la force de travail dans le procès de valorisation constitue pour lui l’amorce d’une crise. La production de valeur via l’exploitation de la force de travail a été remplacée par l’anticipation d’une valeur future sous forme de capital fictif. Il nous a expliqué sa vision du capital fictif : crédit, intérêt, dette. Il a conclu en disant qu’il fallait s’opposer à la folie meurtrière du capital en créant de nouvelles formes de médiations sociales où les individus décideront par eux-mêmes. Eric a été très long dans son intervention (c’était la plus longue De Mattis lui a demandé de s’arrêter ainsi que moi par la suite ; mais ce fut en vain, il a continué de la sorte …

Le quatrième intervenant. Son intervention a été basée sur le caractère virtuel de la monnaie et le développement du numérique. Il nous a parlé qu’avec la globalisation, les transactions sont plus rapides et la monnaie est de moins en moins concrète. Avec la robotisation et « l’intelligence » des machines, il nous interroge sur la fin du travail salarié.

Il y avait une centaine de personnes. Le débat a duré quasiment deux heures. Il y a eu deux à trois interventions de personnes se présentant en tant que militants CGT. Une intervention notoire est celle d’un intervenant parlant de la valeur d’échange (séparation VU/VE nécessité, utilité) Il a lié cela aux problèmes d’abondance et pénurie. Une autre intervention d’une personne s’occupant d’une coopérative à Montreuil dans l’audio visuel interrogeant sur le sens de la valeur. Une autre intervention sur argent et domination. Eric a voulu « reprendre la main » en disant que le capital c’est la production de marchandises. Le capital a besoin du travail parce que c’est le travail qui produit la valeur. J’ai aussi fait une intervention sur le caractère structurel du capital fictif. Autre intervention dans le public sur les banques nationales/ émission de billets. Une intervention aussi parlant des réseaux liés à l’argent. Michel Olivier (proche de Battaglia Comunista) constatait que le débat partait dans différents sens. Il nous dit que ce qui détermine l’argent ce sont les rapports de production. Il met en garde sur l’idéalisation des sociétés primitives qui ont engendré domination et despotisme avant l’apparition de l’argent. Bruno Astarian est intervenu en disant que si on veut abolir la valeur, il faut abolir les valeurs d’échangeabilité. Questionnement aussi sur valeur d’usage et valeur d’utilité.

Ensuite, il y eut un après-débat avec le reste des personnes présentes.

Bruno

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