Après un premier Art et révolution – hier et aujourd’hui D. Hoss poursuit l’échange entamé alors pour répondre à Tension vers la communauté humaine et formes de luttes : de Mai-68 à Notre Dame Des Landes ? de J.Wajnsztejn, texte paru le 27 septembre 2018 sur ce blog.
Jacques,
la question centrale autour de laquelle tourne notre débat se trouve à la fin de ton texte, c’est-à-dire : Quelle différence entre l’esthétisation du monde comme neutralisation des forces de négation et l’appropriation de l’esthétique par ces forces comme arme pour la transformation du monde ? Mon premier texte contenait quelques éléments pour répondre à cette question, mais je vais essayer ici d’être encore plus précis.
Walter Benjamin disait à la fin de son article programmatique L’œuvre d’art à l’époque de sa reproduction mécanisée de 1936 à propos de l’esthétisation de la guerre par Marinetti : « L’humanité, qui jadis avec Homère avait été objet de contemplation pour les Dieux Olympiens, l’est maintenant devenue pour elle-même. Son aliénation d’elle-même par elle-même a atteint ce degré qui lui fait vivre sa propre destruction comme une sensation esthétique ‘de tout premier ordre’. Voilà où en est l’esthétisation de la politique perpétrée par les doctrines totalitaires. Les forces constructives de l’humanité y répondent par la politisation de l’art ». En paraphrasant ce postulat benjaminien nous pourrions dire aujourd’hui : Contre l’esthétisation affirmative de l’ordre régnant par les forces de domination, les forces de la négation de l’humanité y répondent par un usage de l’esthétique comme levier de démontage de ce monde.
Alors, quelle rapport forme/contenu dans un tel entendement de l’esthétique ? J’avais fait référence aux lettres de Schiller Sur l’éducation esthétique de l’Homme où il développe un concept large de l’esthétique, c’est-à-dire comme un rapport de l’homme au monde basé sur un raffinement des sentiments, le jeu, le sens du beau par contraste à un rapport de domination de la nature à travers une raison calculatrice. L’instauration d’un tel rapport esthétique devait ouvrir un nouvel espace pour l’avènement d’une communauté véritable des hommes. L’éducation esthétique dans ce sens est comprise comme une éducation sentimentale. Schiller pose la question « pourquoi nous sommes toujours de barbares ? » et explique que c’est à cause de notre rapport irrespectueux, barbare, à la nature et d’une constitution étatique barbare, basée sur la répression. « En reprenant l’idée de Schiller…on pourrait dire que le barbare n’est pas le sauvage dont les sentiments commandent les principes, mais l’homme civilisé dont les principes détruisent les sentiments 1 » . Adorno et Horkheimer diront plus tard que c’est la dialectique du développement de la raison qui a conduit l’homme à réprimer progressivement la dimension mimétique, esthétique, de son rapport au monde en faveur d’une forme de raison instrumentale, ayant pour objectif la mise en œuvre de la domination dans tous les sens, domination de la nature intérieure et extérieure de l’homme et comme principe de la structuration de la vie sociale.
Mais le programme de Schiller, approfondi et élargi par les romantiques en revendication d’une « poétisation du monde », n’avait pas de chance face à l’instauration d’un capitalisme industriel triomphant qui conditionne et soumet les sentiments et le sens esthétique de plus en plus à une vie normée par l’échange utilitariste, concurrence et pratiques culturelles ostentatoires. Comme il le montre Flaubert à l’exemple de son Fréderic Moreau, « L’éducation sentimentale » de son époque était en réalité une « déséducation », un refroidissement des passions et élans, une adaptation aux goûts et aux aspirations médiocres d’une bourgeoisie victorieuse.
Par contre de nouveaux horizons pour une éducation esthétique et sentimentale sont ouverts par la « révolution esthétique » des Baudelaire, Lautréamont, Rimbaud et autres poètes du milieu du 19ième siècle qui proclament un « dérèglement de sens » pour « changer le monde », invitent à puiser dans les profondeurs de sentiments –même cruels, féroces et effroyables- et dégagent les contours d’une beauté nouvelle. Forme et contenu de l’esthétique changent profondément. L’art de diverses avant-gardes artistiques fait exploser les cadres d’une culture occidentale séculaire et permet en complémentarité avec de mouvements sociaux révolutionnaires de redéfinir la vision d’une communauté humaine libérée des entraves d’un ordre économique et politique dévastateur2. Dans le 20ième siècle cette complémentarité fait naître une convergence des visions artistiques vers une « auto-éducation » et une conscientisation des masses à travers une redéfinition de moyens esthétiques, évoquée avec pertinence par Walter Benjamin : le théâtre à partir de Meyerhold dans la Russie révolutionnaire devient une forme « culinaire » (Brecht) d’expérimentation d’idées et de postures3 ; le film permet aux masses de s’approprier une forme non-contemplative de la perception, de se préparer à travers cette nouvelle forme esthétique à leur tache historique d’un démontage et remontage la réalité ; l’auteur change de statut, il a vocation de devenir un écrivain-opérateur à la place d’un écrivain-informateur (Tetrajkov ), il devient producteur de la réalité en abolissant dans l’espace de l’écriture journalistique la différence entre auteur et lecteur4 ; les surréalistes enfin se lancent à la création de l’image poétique en écriture et peinture pour « gagner les forces de l’extase à la révolution 5 ».
Toutes ces innovations et expérimentations esthétiques avaient comme objectif de contribuer à faire émerger de nouvelles formes de communauté humaine en actes. Mais leur place était bien circonscrite. Elles étaient conçues comme complémentaires voire même subordonnées à l’action politique -jusqu’au moment où l’appareil bureaucratico-étatique stalinien réussissait à les écraser, déformer ou marginaliser dedans et en dehors de l’URSS.
Ce que tu appelles le double caractère de 68 –l’interpénétration d’un mouvement prolétarien classique avec les premières formes d’une révolution à titre humain- pourrait être interprété comme une réapparition d’une tendance latente, marginalisée des mouvements révolutionnaires à partir de la deuxième moitié du 19ième siècle, qui visait justement cette révolution à titre humain, se manifestant, dans certaines phases historiques de libération d’énergies intenses, dans de créations esthétiques bouleversantes. C’est comme un tel assaut vers une nouvelle socialité que Kristin Ross analyse l’évènement dans les passages de son livre sur 68 que j’avais cités. Ni ce livre, ni ses travaux antérieurs –surtout les deux livres sur « l’imaginaire de la Commune » et le rapport de Rimbaud à la Commune- ni son engagement pour la ZAD de NDDL, justifient de la renvoyer à la case « tiers-mondiste gauchiste », comme tu l’avais fait dans ta critique de la première édition de son livre en 2008.
La réapparition d’une orientation révolutionnaire à titre humain s’exprimait dans les années 60/70 principalement en Italie, avec des moyens esthétiques et techniques nouveaux. L’atelier central de ce renouveau était la Radio libre Alice à Bologne qui commençait à émettre en février 1976 et devenait la voix principale et l’accélérateur du mouvement pendant l’apogée du « mai rampant » italien en 1977, que toi et Jacques G. avez si bien décrit en détail. Pour Radio Alice il « s’agissait de valoriser l’expérience des logements collectifs, des cercles, des groupes d’autoconscience, des collectifs d’usine, d’école, d’université et autres, pour faire un réseau susceptible d’alimenter le conflit et de soutenir sa possibilité d’autonomie dans tous les sens, de l’autonomie physique à l’autonomie mentale. En mettant à profit les expériences récentes, ils ne pensent plus uniquement à l’usine comme centre de rayonnement de l’intervention mais à la vie quotidienne dans sa complexité et au rapport critique qui s’établissait entre le jeune prolétariat et la métropole 6 » . L’objectif était une transformation de la vie à travers la création « des liens de vie quotidiens, d’amour et d’amitiés, du refus du travail et du plaisir d’être ensemble. »7 Une « agrégation et collectivisation du désir » devait se faire « sur le terrain des pratiques de transformation (mise en commun, étude collective, pratique d’autoconscience, appropriation, écriture collective, communication) 8 ». « La production d’information pouvait enfin se faire de façon collective9 » . L’inspiratrice de Radio Alice était la revue A/traverso qui reprend le fil de la ligné historique d’une esthétique de la révolte : « ses références culturelles vont de Rimbaud à Lautréamont, d’Artaud à Debord…mais ses véritables modèles étaient les avant-gardes historiques : formalistes russes, futuristes révolutionnaires et surtout dadaïstes10 ». « Et c’est Maïakovski –qui a pu renaître dans l’Italie des années 1970 grâce au roman de Bifo, Chi ha ucciso Majakovskij ? (« Qui a tué Maïakovski ? », Milan, Squi/libri, 1977)-qui signalait la voie de l’abolition de la séparation spectaculaire entre mouvement et parti, art et vie, lorsque l’exception devient quotidien et le quotidien extraordinaire : poésie est faire la révolution. »11
Selon Franco « Bifo » Berardi, fondateur de la revue A/traverso et un des principaux initiateurs de Radio Alice, on assistait à une « maturation du nouveau sujet social…qui ne peut pas se poser la question de la libération sociale s’il ne se pose pas la question de l’affection, du plaisir érotique, de l’amitié joyeuse12 . » Par contre le mouvement pouvait –en rupture d’avec les orientations de ses modèles artistiques mentionnés- bien se passer d’une division de travail avec un parti politique révolutionnaire ou déclaré comme tel, finissant tôt ou tard comme fossoyeur de ces avant-gardes par élimination, marginalisation ou récupération.
Depuis ce point culminant de l’émergence d’une nouvelle sensibilité dans la jeunesse au niveau international à cette époque, à travers une auto-éducation esthétique et sentimentale13 , nous avons assisté pendant 40 ans à une désensibilisation massive, à un bombardement constant de sons et lumières glorifiant et esthétisant violence et brutalité, vulgarité et bêtise au détriment du sentiment érotique, de la tendresse et de la sensibilité esthétique. Les pulsions primaires ne sont plus réprimées comme avant, l’individu ne souffre plus principalement à cause des interdits et inhibitions. C’est le contraire. Il est victime d’un réchauffement permanent de sens, d’un trop plein de possibilités d’une fast-satisfaction. Cette nouvelle forme de gestion de pulsions détruit aussi bien sa capacité de discernement que sa capacité d’éprouver d’émotions et de sentiments originaires de son corps et son âme. Il s’agit d’un approfondissement d’un processus que Marcuse avait appelé « désublimation répressive ». Le principe de plaisir est soumis d’une nouvelle façon au principe de réalité. La jouissance est déformée en performance. Le mesurable, le comparable, l’exploit prime. Il faut de l’extrême pour sentir encore quelque chose, pour se sentir vivre : sport extrême, tourisme extrême, sexe extrême, évènements spectaculaires extrêmes. La brutalité extrême des actes sadiques et violents dans les espaces publics et privés n’est que la pointe de l’iceberg de cette désensibilisation.
Nous sommes confrontés à une nouvelle étape de « mutation anthropologique ». Adorno avait parlé depuis les années 40 d’une mutation anthropologique dans le sens d’une généralisation de la « froideur ». « Les eaux glacées du calcul égoïste » dont parlait Marx dans le Manifeste avaient atrophié d’une façon dramatique la sensibilité et le potentiel d’empathie de l’homme. Aujourd’hui cette froideur est accompagnée d’une surchauffe permanente de sens qui les menace d’une nouvelle manière : « L’accélération des moyens, la multiplication des sources ont produit un effet d’intensification des stimuli neurosensoriels, et donc un effet de confusion émotionnelle…Les cerveaux sont en perpétuelle connexion, mais les corps ne se rencontrent plus entre eux…L’effet produit par la numérisation des communications se constate dans la dépression massive, dans la solitude érotique d’une génération qui est à la fois hyper-connectée et de plus en plus mal sa peau. C’est la peau qui est en question dans la mutation connective, la sensibilité de l’épiderme social, et donc l’empathie. Tu sais, l’empathie n’est pas quelque chose qui concerne la dimension morale, cela relève de la peau, du plaisir et de la souffrance…Je crois que nous sommes en train de vivre une transition anthropologique…La raréfaction et la disparition de la compréhension sensible est, à mon avis, l’origine principale de la vague de fascisme qui est en train de submerger l’héritage de courtoisie et de civilité14 . »
Contre cette vague de désensibilisation d’un nouveau type, une réorientation profonde dans la lutte pour une refondation des relations sociales est en train de s’opérer. Après un siècle d’efforts pour faire tomber les entraves extérieurs et intérieurs qui enchainaient les jouissances, on commence à prendre conscience qu’il s’agit aujourd’hui plutôt de tirer un frein d’urgence face à un déchainement sans limites de moyens économiques, techniques et psychologiques pour provoquer de pseudo-jouissances, des simulacres et des ersatz. A la désertification du monde par la chasse aux dernières chances de valorisation du capital correspond une exploitation des derniers restes du vivant dans l’homme par leur transformation en sensations marchandables. La lutte contre la destruction du monde par des « Grand Projets » se combine avec une lutte contre la transformation des hommes en robots dociles et zombies hystériques. C’est cela que s’impose comme conclusion à la fin d’un « voyage au cœur des nouvelles pratiques révolutionnaires » entamé par Serge Quadruppani où il dit qu’il ne reste qu’un seul parti pris : « Ce parti pris, c’est celui d’opposer au rapport d’exploitation un tout autre rapport entre les humains et avec la nature : celui de l’Alliance du Vivant15 . »
Tu me demande dans ton texte, Jacques, en quoi sont alternatives les formes de vie que la ZAD de NDDL a expérimenté. Serge Quadruppani montre bien dans son livre qu’ ici comme ailleurs il s’agit ni de plus ni de moins que d’inventer de nouvelles façons de faire monde : remplacement de l’argent comme moyen de se relier à l’autre ; développement de formes de production et distribution ( nourriture, habitat, infrastructures) en commun ; organisation de la vie quotidienne sur la base du consentement et du respect de la singularité ; un temps et rythme de la vie –taches communes, débats, « composition » du rapport à l’autre, fêtes- choisis16. Finalement son livre donne à voir que la ZAD de NDDL ne constitue pas, comme tu dis, une « enclave de résistance à la domination capitaliste de l’espace. Une résistance partielle qui ne peut avoir son extension. » Car il-y-a un lien entre de différentes luttes au niveau international. Quadruppani cite l’exemple d’un militant suédois qui a raconté son trajectoire à travers Europe jusqu’à NDDL en passant par Hambach en Allemagne : « Sa trajectoire, une parmi tant d’autres, paraissait illustrer le lien entre les luttes d’opposition aux Grands Projets inutiles imposés, […] comme si elles n’étaient pas uniquement déterminées par leur situation locale spécifique, mais insérées dans un enchevêtrement complexe d’échanges, d’interdépendances, d’influences avec autres luttes. Un enchevêtrement déployé sur le territoire du continent, voire du monde17 ». « Des ZAD partout ! » est le mot d’ordre unificateur.
L’émergence de nouvelles formes de vie à NDDL et ailleurs est accompagnée par de moyens de publication et de communication de plus en plus collectif : livres (Constellation, Itinérances) et surtout de sites et de blogs d’une nouvelle qualité (lundi matin, Grozeille, Zadibao) qui sont coproduits par des équipes de rédaction et de correspondants spontanés, ils s’y mêlent reportages et réflexions théoriques, mais aussi textes littéraires, images et vidéos. En plus, ils se produisent déjà de premiers rapprochements à travers les lignes de démarcations d’orientation théorico-politique, un objectif que nous avions en vue à l’époque des Journées Critiques : lundi matin publie de prise de paroles et de bonnes feuilles des auteurs pas forcement de son orientation, comme par exemple les extraits de ton livre sur 68 ; il y avait récemment ton rencontre à Eymoutiers avec Charles Reeves, Serge Quadruppani et Michèle Riot-Sarcey ; il y a notre échange sur votre blog…
Cette année on entendait de voix exprimer l’espoir d’un nouveau 68 dans les rues de Paris. Finalement, c’est en ce novembre que se produit une mobilisation d’auto-organisation spontanée formidable qui n’a pas dit encore son dernier mot. Et dans les expérimentations des ZAD et les échanges et réflexions autours de nouvelles pratiques révolutionnaires se préparent de prises de conscience et évocations imaginaires qui pourront -après la traversée du désert des décennies post-68 et face à la déferlante d’un National-Etatisme autoritaire dans le monde- contribuer à ce que de tels mouvements naisse un nouveau Mai, rampant peut-être d’abord.
Entre beaux moments d’appels d’air plein d’espoir, et le désespoir profond suite à des échecs et défaites accablantes une sensibilisation nouvelle commence à montrer ses contours. Peter Weiss avait titré son grand œuvre sur les mouvements révolutionnaire du 20ième siècle « L’esthétique de la résistance », cette nouvelle sensibilité met en œuvre plutôt une esthétique comme résistance. Un texte qui exprime d’une façon particulièrement claire cette nouvelle dimension de la lutte est la contribution récente de Marcello Tarì au livre Itinérances sous le titre « La commune sauvée ». Dès le début il indique la nouvelle place de l’esthétique dans la lutte par une citation en prologue : « Dans nos ténèbres, il n’y a pas une place pour la Beauté. Toute la place est pour la Beauté. René Char, Feuillets d’Hipnos18 ». Et, bien sûr, il revient à la vision des poètes russes dans la révolution bolchévique : « Aleksandr Blok disait que la révolution, c’était de ‘ Tout refaire ‘. De faire en sorte que tout devienne nouveau ; que notre vie fausse, sale, ennuyeuse, monstrueuse devienne une vie juste, propre, joyeuse, magnifique » (L’intelligentsia et la Révolution19 ). Il évoque la nécessité d’une « éducation sentimentale » face à un monde glacé, rompant ainsi avec la fascination d’un certain insurrectionalisme pour la violence : « …si ce monde n’était pas un puits de malheur gelé sous la forme de l’état des choses présentes, nous n’aurions pas besoin à parler de communisme. Pour faire fondre cette glace, il ne suffit pas de s’armer de barres et de cocktails Molotov, il faut savoir aimer. C’est cela que la gauche, et non seulement celle des partis, mais aussi celle ‘diffuse’ qui pollue les individus, n’a jamais réussi à faire20. » Et il finit avec un éloge à la nuit qui ne fait pas seulement résonner les hymnes de Novalis mais éclaircit aussi un certain image énigmatique de Max Ernst21 : « La nuit est la poésie de l’existence, face à la dure prose du jour ; elle inspire la profondeur que l’obscurité fait surgir, puis expire les souvenirs qui nous font soudainement comprendre que l’Histoire n’est pas que l’ombre que jette l’ici et maintenant du monde sur le passé des vaincus. La révolte seule rend au fur et mesure l’Histoire transparente et destituable, du fait qu’elle la brise, en nous mettant en contact avec sa vérité…Et lorsque, soudainement, vous apercevrez que cette obscurité est la couleur de votre vie passée et de toutes les moindres vies qui se sont écoulées dans les tourbillons de l’histoire, vous saurez que celle-là est la nuit de la commune sauvée, qui ne sera à l’évidence pas habitée par les ‘ hommes ‘. Le reflet de cette image de bonheur est la pietas que le communisme éprouve tous les jours pour l’insauvable humanité. De cette pietas est imprégnée la destruction de l’état des choses présentes22» .
- Elisabeth Lenk, Théorie critique et pratique surréelle, dans : Agone 20/1998 p.22 [↩]
- Les dérives et errements des uns et des autres artistes, dans un contexte historique toujours plus oppressant et barbare, ne peuvent pas effacer leurs actes audacieux fondateurs. Par exemple l’activité commerciale de Rimbaud en Arabie pour acquérir les moyens financiers lui permettant de continuer ses voyages d’explorations ne peut nullement mettre en question l’importance de sa refondation de la poésie. Pardon, mais cela me fait penser un peu au proverbe chinois qui dit qu’il ne faut pas regarder le doigt qui montre la lune. [↩]
- Walter Benjamin, Was ist episches Theater? (Qu’est ce que le théâtre épique ?), 1939 [↩]
- Walter Benjamin, Der Autor als Produzent (L’auteur comme producteur), Conférence du 27-4-1934 à l’Institut d’études sur le fascisme à Paris [↩]
- Walter Benjamin, Le surréalisme, 1929 [↩]
- Marcello Tarì, Autonomie ! Italie, les années 1970, La fabrique 2011 p.195 [↩]
- Id.p.198s. [↩]
- Id.p.199 [↩]
- Id. p.201 [↩]
- Id. p.202s. [↩]
- Id. p.203s. [↩]
- De Radio Alice au smartphone ubiquitaire –Conversation avec Franco ‘Bifo’ Berardi dans : l’Ecoute no 13/printemps 2018 ; en ligne : http://syntone.fr/de-radio-alice-au-smartphone-ubiquitaire-conversation-avec-franco-bifo-berardi/ [↩]
- Il faut bien mettre en ligne de compte les divers courants de sub- et contreculture à partir des beatniks –avant leur récupération/déformation par l’industrie culturelle facilitée par le retour au bercail de la servitude volontaire de pas mal de moutons noirs. [↩]
- De Radio Alice…op.cit. Concernant « l’héritage de courtoisie » Bifo s’était référé à la courtoisie de l’époque des troubadours et du « dolce stil novo » du Bas Moyen-âge en Italie. [↩]
- Serge Quadruppani, Le monde des Grands Projets et ses ennemis-Voyage au cœur des nouvelles pratiques révolutionnaires, La Découverte 2018 p.148 [↩]
- Id. p. 124s. Quadruppani cite le Collectif Mauvaise Troupe qui écrivit : « Contrairement à ce qui a lieu dans les rues des villes ‘policées’, à la ZAD, personne ne dort dehors et chacun mange à sa faim. De grands dortoirs accueillent les arrivants, un ‘non-marché’ hebdomadaire propose les légumes, la farine, le lait, le pain et les fromages produits sur place, sans qu’un prix ne vienne en sanctionner la valeur. Dans les nombreuses infrastructures collectives, mais aussi dans les échanges ou les travaux communs, les relations se basent sur la confiance et la mise en commun, à l’envers des logiques ayant cours qui s’appuient sur le soupçon et l’individualisme. Ce que les cyniques de tous bords taxent d’utopie irréalisable est éprouvé dans les gestes et la matière. Même l’absence de police et de justice –les gendarmes ne fréquentant plus la zone depuis 2013- n’a pas produit le chaos que d’aucuns aurait imaginé et souhaité. …Tout ceci ne va pas sans heurts, évidemment, si déshabitués que nous sommes à décider nous-mêmes de nos devenirs. Nous réapprenons, nous apprenons, et rien n’est plus joyeux et passionnant que de se plonger dans cet inconnu. » Extrait de ZAD : Valls sans retour, Collectif Mauvaise Troupe, https://zad.nadir.org/spip.php?article4099. [↩]
- Id. p.102, extrait de : Diane Robert, « Les luttes contre les grands projets inutiles forment un réseau souterrain », Reporterre, 2 juin2015 [↩]
- Marcello Tarì, La Commune sauvée, dans : Itinérances coordonné par Josep Rafanell I Orra, Les Laboratoires d’Aubervilliers 2018, p. 43 [↩]
- Id. p.50 [↩]
- Id. p.49 [↩]
- Max Ernst, Piéta ou la révolution la nuit, 1923 [↩]
- Id. p.56s. Dans le même esprit voir aussi le texte : https://lundi.am/Hey-hey-aujourd-hui-j-ai-sauve-le-monde-par-marcello-tari [↩]
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