Quand des anthropologues anarchistes veulent « civiliser » l’État

« Les déchirements du capitalisme du sommet » que nous analysons dans le n° 22 de Temps critiques (automne 2022) accentuent encore davantage les tensions entre les tendances démocratistes et les tendances souverainistes des États.
De sorte que les incertitudes géopolitiques se creusant et les guerres à dimension mondiale se multipliant, ce sont non seulement les fondements mêmes de la souveraineté de l’État et de son efficience qui sont questionnés et qui réapparaissent sur la scène politique, mais le devenir même de l’État qui serait en jeu.
Sous le titre, « Dépasser l’État », un récent article du journal Le Monde présente les thèses des anthropologues anarchistes sur la question de l’État. On lira ci-dessous le commentaire proposé par Jacques Guigou.


Notes sur « Dépasser l’État » (Le Monde, 25 nov. 23)

Le titre de cet article sur un possible « dépassement de l’État » se veut attractif pour des lecteurs du journal Le Monde qui partagent volontiers l’idéologie du dépassement, un des mots d’ordre de « la révolution » impulsée par « la transition vers le nouveau monde ». Une attraction vite décevante à la lecture du texte, puisque puisqu’il se conclut par « l’impossibilité de son abolition » et que, de plus, l’État « est devenu un horizon intellectuel indépassable » (Descola).

En réalité, l’auteur présente les travaux des quelques anthropologues américains qui depuis environ deux décennies sont des continuateurs des thèses de Pierre Clastres sur « La société contre l’État » et aussi celles d’autres auteurs sur les origines de la « souveraineté étatique ».


En 1974, à la publication du livre de Clastres, nous avions indiqué la méprise qu’entretiennent les travaux de cet anthropologue : aucune société ne s’oppose à l’État ; elle se combine avec lui. Seules peuvent s’opposer à lui, les formes de groupement humain de type communautaire qui sont d’une part bien antérieures aux sociétés et d’autre part, dans la période historique, sont extérieures, éloignées ou étrangères aux sociétés, toutes plus ou moins étatisées.


David Graeber et Marshall Salins sont les deux figures les plus connues de ces courants. Graeber, auteur de nombreux essais dont un sur la dette, a été un des leaders du mouvement Occupy Wall Street. En France Philippe Descola, un des diffuseurs de cette anthropologie politique et historique, défend les expériences libertaires des ZAD mais aussi celles du Rojava (Kurdistan) et du Chiapas. Autant de modes de vie collectifs qui dit-il, agissent « dans les interstices » qu’ils occuperaient contre (ou malgré) le pouvoir territorialisant de l’État.


Sur les premières formes d’État, ces anthropologues ne sont pas très convaincants. Ils passent sous silence la longue période pendant laquelle les groupes humains du paléolithique vivaient en communauté, ce qui ne signifie pas que celles-ci étaient exemptes de formes de pouvoir liées au sexe, à l’âge, à la parole, etc. Le passage se fait lentement avec l’émergence des « grands hommes » (Lugan) puis des chefferies, puis des royautés.


La communauté-société n’est pas séparée de l’État et de son organisation. Dans mon article de 2012 sur « L’État réseau et la genèse de l’État » je vois des analogies entre ces communautés-sociétés et l’État sous sa forme réseau d’aujourd’hui. Jacques Camatte les nomme « l’État sous sa première forme ». Une hiérarchisation sociale s’affirme ; une entité supérieure (roi divin, pharaon, prêtres, économie palatale) exerce un pouvoir participatif ;la société n’est pas séparée de l’État. Ce n’est qu’avec la seconde forme de l’État qu’intervient la séparation entre l’État et la société. Dans les empires mésopotamiens et assyriens, les royaumes mèdes, les cités-États grecques l’État s’autonomise de la société et de ses divisions, il se constitue comme unité supérieure qui assure un ordre militaire, religieux, politique et économique. Cette émergence lente et discontinue de l’État dans les sociétés historiques ne semble pas être un sujet d’intérêt pour les anthropologues anarchistes. L’État semble avoir été identique à lui-même depuis la nuit des temps


La dimension communauté humaine est absente de cette anthropologie anarchiste. C’est une de ses principales faiblesses et cela oblitère nombre d’écrits de ses auteurs.

James Scott, un autre essayiste de ce courant, dans Homo domestique. Une histoire profonde des premiers États (2019) cherche à montrer que l’État a une place modeste dans l’histoire humaine. Il critique les philosophes classiques de l’État (Bodin, Hobbes, Locke, Rousseau) pour qui l’État est un principe universel et en quelque sorte, adéquat à la nature humaine.

Mais il conduit sa critique sur la seule base de l’histoire d’une population d’une région montagneuse du Sud-Est asiatique : Zomia qui durant des siècles se serait passée d’un État et même de gouvernement. L’exemple est intéressant, mais pas concluant. L’absence d’un État central, n’est pas la preuve d’une société exempte de formes étatiques. À Zomia comme ailleurs, des pouvoirs locaux, des chefferies, des clans, des confréries ont pu conduire à la création d’États. Par exemple dans la civilisation berbère, s’est opéré un lent et discontinu passage de formes communautaires à des formes de sociétés plus ou moins étatisées : des confédérations de tribus rassemblées dans une dynastie royale. Scott avance ailleurs que l’effondrement des empires signifiait pour la majorité de leurs habitants « la destruction d’un ordre social oppressif ». Or, tous les empires, à toutes leurs époques, n’ont pas été essentiellement oppressifs. La forme impériale de l’État n’a pas été et de loin, la seule forme prise par les États au cours de l’histoire. Les fédérations de nations, par exemple, sont parvenues à des régulations de rapports sociaux qui n’étaient pas essentiellement « oppressifs ». Ainsi en fut-il des États du Languedoc aussi bien dans l’époque médiévale que moderne.


Là encore, le credo anarchiste selon lequel l’État n’est que répressif induit des méprises. Que l’État puisse être en quelque sorte cogéré par les individus, les groupes, les réseaux, sont des dimensions politiques absentes chez les anthropologues anarchistes. Comme chez Clastres, la société ne peut qu’être « contre l’État ».

La contre-dépendance des anarchistes vis-à-vis de l’État que nous avons soulignées à maintes reprises se vérifie ici sans surprise. En définitive, pour ces anthropologues anarchistes (comme pour des philosophes d’ailleurs, par exemple les livres de Jean-Claude Michéa sur le libéralisme comme origine et cause du capitalisme), la forme étatique qui est en filigrane de leur vision, c’est un État social-libertaire. Soit une forme proche de celle de l’actuel État réseau.


Dans mon article « L’État sous la forme nation et sous la forme réseau », Temps critiques, n° 20, automne 2020, j’ai précisé ces deux notions et explicité leur effectivité actuelle.


Sur l’État moderne, ces auteurs semblent découvrir que l’État opère par « une chaîne d’abstractions » ; que « l’abstraction est le premier vecteur de la domination de l’État ». Hegel connaît pas ? L’État comme retour en soi de l’Esprit dans le monde et comme accomplissement de la raison dans l’histoire, voilà une « chaîne d’abstractions » qui ne date pas d’hier, mais que nos anthropologues anarchistes semblent négliger. Ce qui n’est pas étonnant quand on sait le sort qui est fait à la dialectique aujourd’hui dans les milieux « éveillés ».


Plus près de nous, il y a près de 50 ans, Henri Lefebvre définissait l’État comme « une forme de formes » et il l’analysait de manière bien plus probante, malgré l’impasse dans laquelle il s’est fourvoyé avec son concept de « mode de production étatique ». Au moins, Lefebvre tenait-il compte de l’analyse du « dépérissement de l’État » chez Marx. Eux veulent le « civiliser » dans une société socialo-libertaire avec un État dont la forme réseau semble la plus appropriée.


Comme la forme communauté et la notion de communauté-société sont absentes pour com-prendre la genèse de l’État, la forme État- royal est également absente de leur histoire médiévale et moderne de l’État.

De sorte qu’ils en viennent à faire de la « révolution papale » l’origine de la souveraineté de l’État. « L’Église-État » et son administration serait le modèle à partir duquel se serait affirmé l’État et sa légitimité politique et philosophique.


Comme si les tensions, les contradictions et bien sûr aussi les alliances entre l’Église et l’État royal n’avaient pas influencé le devenu de l’État sous sa forme nation. La Révolution française est emblématique de ces oppositions : elle s’est faite contre l’Église et ses fidèles, en discontinuité violente avec celle-ci ; mais elle fut davantage en continuité de fait avec l’État royal même si politiquement, elle a pris sa place. La continuité entre la monarchie absolue française sous Louis XIV et le jacobinisme révolutionnaire a pu être soulignée par des historiens qui n’étaient pas tous des « contre-révolutionnaires ».
Transparaît encore ici le présupposé anarchiste de ces anthropologues ; un présupposé qu’ils ne questionnent pas lorsqu’ils se font historiens. Comme, par exemple, dans l’affirmation sui-vante de David Graeber, « Le néo-libéralisme nous a fait entrer dans l’ère de la bureaucratie totale » (site Les crises, 8 nov.2015). Désirant combattre l’État et le marché, Graeber en vient à assimiler les politiques néolibérales de dérégulation avec un accroissement de la bureaucratisation aussi bien dans l’administration d’État que dans les firmes privées. Il ne semble pas percevoir que les réseaux, le management individualisé et les processus de particularisation ont profondément transformé les organisations bureaucratiques de la période industrielle du capitalisme. Après l’échec des mouvements contestataires, antiautoritaires et d’insubordinations dans les années 65-75, l’État et la société ont été puissamment débureaucratisés. C’est un processus inverse à celui de la « bureaucratisation du monde1 » critiqué par Bruno Rizzi à la fin des années 30. Mais pour que l’antiétatisme anarchiste garde une portée politique crédible, il faut que l’ennemi soit encore et toujours « le plus froid des monstres froids » (Nietzsche).


Pour les anthropologues anarchistes, la globalisation est à la fois nationale et libérale. Elle combine universalisation de l’État-nation, identitarisme national ou communautaire et puis-sance économique technique et culturelle. La synthèse de cette dynamique néo-libérale de l’État trouverait aujourd’hui ses porte-drapeaux avec Trump, Erdogan et Modi (auxquels ils vont ajouter le nouveau président argentin Milei). Partisans d’une version social-libertaire de l’État, on ne trouvera pas dans les écrits de ces anthropologues une analyse sur les raisons politiques et économiques qui font que de tels chefs d’État à tendance autoritaire réalisent la synthèse entre la forme nation et la forme réseau de l’État alors que des démocrates « pur jus » n’y parviennent pas.


Hégémonie du néolibéralisme, tel est leur dernier mot sur le mouvement du capital. Xi Jinping, Biden, l’UE, Lula, Maduro et quelques autres, monteraient-ils la voie pour sortir de « l’hégémonie du néolibéralisme ? »


Autant de questions qui ne semblent pas troubler ces anarchistes qui dissertent sur l’histoire de l’État… sans parler du capital et des divers rapports que l’État entretien avec lui.
Fredy Perlman avec son Against His-Story, Against Leviathan (1983) et malgré son anarcho-primitivisme, avait tout de même un autre souffle politique et anthropologique.


JG
12 déc. 2023

  1. Bruno Rizzi, La bureaucratisation du monde, Première édition1939, seconde édition Champ Libre, 1976. []

L’Ukraine 2022 n’est pas l’Espagne 1936

Lettre réponse de Jacques Wajnsztejn à l’appel à la réunion organisée le 12 mars 2022 à Lyon par le groupe d’inspiration libertaire NINA-Lyon en soutien aux anarchistes ukrainiens (English version lower).


Bonsoir,
Je viens de lire votre appel à la RU de ce soir. Je m’étonne qu’il n’y ait pas de discussion préalable à ce soutien où en tout cas à ce type d’intervention dont on ne voit pas clairement la finalité.

Sur la question politique, au moins deux questions ne sont pas posées :

  • si on peut avoir une position politique, en général, sur « le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » et quelle qu’elle soit, il me semble qu’elle doit être référée d’abord à la direction de la lutte (voir le choix entre le MNA et le FLN où le soutien au stalinien Hô Chi Minh), mais surtout au fait que dans le cadre de ce droit, c’est à cette population de se déterminer et nous nous sommes extérieurs à cette question. Retour donc au problème de la direction politique et militaire où le plus grand flou règne en Ukraine, sur cette direction
  • s’il s’agit d’être favorable ou de profiter d’une situation pré-révolutionnaire quels éléments nous permettent de dire que ce n’est pas simplement une réponse nationaliste ou plutôt patriotique à l’attaque russe à laquelle il n’y a pas de raison de s’y impliquer autrement que par une position traditionnelle anti-guerre ou pour la paix qui transparaît d’ailleurs dans l’appel, mais qui me semble contradictoire avec ce qui serait la formation d’une brigade internationale d’intervention.

Sur la question pratique de l’intervention
Dans la guerre d’Espagne, il y a eu deux phases, dans la première, celle d’avant la militarisation, les volontaires pouvaient s’engager sur des bases affinitaires et politiques dans des colonnes particulières et, pour faciliter les choses avec des sous colonnes nationales comme par exemple les italiens dans la colonne Ascaso1. C’était pareil dans la colonne Durutti dans laquelle s’est engagée par exemple, Simone Weil puisque les femmes pouvaient s’engager pour combattre au front. Il y avait là ce que j’appelle une autonomie de commandement. Mais la majorité des volontaires venaient des grosses organisations et passaient par leur biais pour être dirigés vers des « brigades internationales » dans le cadre du combat antifasciste et dans aucune autonomie par rapport au pouvoir central républicain et sur le terrain, sans autonomie par rapport à la direction stalinienne. Mais à partir de la décision du gouvernement républicain et sous pression socialiste et stalinienne de militariser l’armée dans un combat non plus de révolution sociale, mais de guerre antifasciste, cette autonomie a été éliminée par le droit et la force au besoin comme on le voit bien dans le film Land and Freedom.

Que se passe-t-il aujourd’hui par rapport à l’Ukraine ? Si je prend l’exemple de Lyon, vous organisez une réunion pour soutenir les anarchistes ukrainiens, mais tout comme je le disais plus haut, aucune discussion préalable n’est proposée pour savoir quel est le pourquoi de notre intervention (la question sociale ne semble jamais directement abordée en Ukraine alors que corruption et oligarques y font la loi, malgré un dernier scrutin à peu près démocratique. Il n’est donc pas étonnant que les seules questions et discussions qui ont eu lieu, d’après Gzav qui était présent, sont venus d’individus qui, de fait, reprennent les arguments de Poutine sur le Donbass, etc. Cela me rappelle la grande réunion à la Gryffe sur les Gilets jaunes le 30 novembre. Si ceux qui organisent la réunion n’ont pas les arguments pour préparer l’intervention politique où au moins dire ce qui justifie ton intervention, tu laisses forcément la parole à ceux qui implicitement ou explicitement veulent saboter l’initiative.

Cela dit, quelle serait donc la meilleure intervention possible ? Malgré l’intention d’origine de soutenir les anars ukrainiens donc dans une optique affinitaire, l’appel est truffé de références à la lutte anti-impérialiste et antifasciste diluant le caractère affinitaire dans un magma résistant. La logique de tout cela c’est donc de se fondre dans l’armée ukrainienne, ne serait-ce que sous sa structure territoriale, car c’est la seule qui délivre des armes. Les groupes ukrainiens d’anciens soldats d’Afghanistan ou d’ailleurs l’ont bien compris puisqu’ils semblent demander l’admission dans l’armée en tant que groupes. Là aussi aucune autonomie et là aussi c’est logique puisque la mobilisation générale est décrétée, la militarisation est actée dès le départ et les pôles de recrutement refusent d’ailleurs plus de volontaires qu’ils n’en acceptent car sous prétexte d’impréparation des volontaires ou d’infiltration, nulle part on ne donne des armes au « peuple ». la situation est donc de toute façon très différente de celle du Rojava quoiqu’on pense d’ailleurs de cet autre engagement.

Voilà pour le moment,
Amicalement,

JW


Hi.

I’ve just read your call for tonight’s get-together. I’m surprised there was no prior discussion on this support initiative or in any case on this type of action, whose purpose requires clarification.

In political terms, at least two issues have been left out:

  • If this is about arriving at a political stance of some kind on “the right of peoples to self-determination,” it seems to me that such a position would have to refer, for starters, to the leadership of the struggle (e.g., the choice between the MNA [Mouvement National Algérien] and the FLN [Front de Libération Nationale] or support for the Stalinist Ho Chi Minh), but more importantly, to the fact that with the right to self-determination, it’s up to the population in the given country to decide on a stance, whereas we are outsiders. This takes us back to the issue of the political and military leadership, which in Ukraine today is extremely hazy.
  • If the point is to be in favor of or take advantage of a pre-revolutionary situation, the question is what grounds we have for claiming that this isn’t just a nationalist, or rather patriotic response to Russian aggression, in which case there is no reason for involvement other than through a standard anti-war or pro-peace position. That in fact is the sense one gets from the call, but it strikes me as being in contradiction with the idea of forming an international brigade.

Now to the practical issue of what action to take.

The Spanish civil war involved two phases. In the first, prior to militarization, volunteers could join up with this or that column on the basis of affinity or political agreement, and to make things more convenient, sub-columns by nationality were set up, for example for Italians in the Ascaso column2 , while Simone Weil took part in the Durruti column, since women were allowed to join up to fight on the front. This was also true of the POUM’s columns. I would describe this as autonomy of command. However, most volunteers came from large organizations that funneled them into “international brigades” in the name of the struggle against fascism. They had no autonomy from the republican central government or, on the ground, from the Stalinist leadership. But once the republican government, bowing to socialist and Stalinist pressure, moved to militarize the army as part of an anti-fascist war instead of a social revolution, any previous autonomy was eliminated by law as well as by force, as the movie Land and Freedom shows vividly.

Now, what’s being done at present in relation to Ukraine? If we look at Lyon, you hold a meeting in support of Ukrainian anarchists. But as I mentioned, you didn’t suggest any prior discussion to hash out the grounds for our involvement. People in Ukraine don’t appear to be directly addressing the “social question” although corruption and the oligarchs hold sway, despite the more or less democratic recent election. So it isn’t surprising that the only real issues and discussions, according to Gzav, who attended the meeting, were put forward by people who basically parroted Putin’s line on the Donbas, and so on. It all reminds me of a well-attended meeting at the Gryffe [anarchist bookstore] on the Yellow Vest movement on November 30th. If the meeting organizers don’t have arguments to set the stage for political action or at least explain why such action would be justified, you inevitably wind up giving the floor to people who implicitly or explicitly aim to sabotage your initiative.

What, then, would the best possible form of action be? Despite the initial intention to support Ukrainian anarchists on an affinity basis, the call is full of references to the anti-imperialist and anti-fascist struggle, diluting the affinity-based approach in a resistance hodgepodge. The underlying logic is to merge into the Ukrainian army, at least into its territorial structure, since that’s the only authority to hand out weapons. Groups of Ukrainian veterans from Afghanistan and other wars are well aware of this, since they seem to be requesting their incorporation into the army as pre-existing units. Here again, there is no autonomy. And here again, that’s understandable, since a general mobilization has been decreed, militarization has been taking place from the very start, and recruitment centers are turning down more volunteers than they are accepting, citing a lack of training and the risk of infiltration. Nowhere are weapons being distributed to “the people.” The situation is in any case entirely different from the one in Rojava, whatever one may think of participation in that struggle.

Those are my thoughts for now.

Yours truly,

Jacques Wajnsztejn

  1. cf. http://www.gimenologues.org/spip.php?article634 []
  2. http://www.gimenologues.org/spip.php?article634 []