A propos de l’Aufhebung chez Hegel et Marx, la question du dépassement

Le texte qui suit est une réponse au texte « Le criticisme est-il curatif ou antiseptique ? » de B.Pasobrola de septembre 2015 continuant les développements de la série de texte suivant :

Partie I – Puissance du capital et captation
Partie II – Dépassement, englobement et couple imaginaire/rationnel
Partie III – Temps et durée, rationalisation et autonomie
Partie IV – Raison, totalité et universalité
Partie V – Social-historique ou imaginaire social

D’échanges centrés sur la notion de dépassement B.Pasobrola d’une part et JW/Laurent d’autre part, en arrivent à de profondes divergences. Remettant en cause le rattachement critique aux « Lumières » et à l’universalisme de Temps critiques, B.Pasobrola propose de se détacher de toute lecture rationaliste pour lui préférer celle entamée par C.Castoriadis à partir des années 1970 et centrée sur l’imaginaire social, cette dernière notion maintes fois critiquée au sein de la revue par J. Guigou…
Cette réponse a d’ailleurs fait l’objet d’autres développements en liaison avec un travail de J. Guigou sur la portée actuelle des thèses de Hegel. Le tout sera rassemblé dans un ouvrage à paraître à l’automne 2016 aux éd. L’Harmattan (titre probable : La dialectique à bras le corps).


Bernard,

Devant le côté ardu et abstrait de nos échanges, il nous semble que ça faciliterait les choses que de mettre un sens précis sur les termes employés. Ainsi, pour ne parler que du titre, « le criticisme » que tu vises n’est pas spécifié : s’agit-il du criticisme au sens des dictionnaires et de wikipédia, c-à-d d’une critique de la valeur de la connaissance, donc dans son sens kantien ; ou alors du criticisme au sens de Marx dans ses attaques contre la « critique critique » néo-hégélienne (La sainte famille) ; ou alors d’une remise en cause de la notion même de « critique » qu’on retrouve chez des auteurs aussi différents que Camatte depuis la série IV d’Invariance (la critique participe de la dynamique du capital et non de sa contestation), Deleuze et Guattari (critique de la négativité dialectique) ou chez les membres du « Comité invisible » qui prennent toute critique fondamentale pour une tentative de restaurer une « République des lettres1» alors qu’il s’agirait aujourd’hui de « mouiller le maillot » et de « mettre la main à la pâte » puisque c’est l’insurrection qui vient. Ces trois dernières options ruineraient d’ailleurs fondamentalement tout le projet initial de la revue Temps critiques.

Autre chose, toute activité théorique (et plus généralement toute affirmation de position) a besoin de se comparer et de fait, de se confronter à d’autres mais est-ce nécessaire de le faire en simplifiant ou caricaturant à l’extrême ces positions2? Ainsi, par exemple, est-ce normal de ne pas tenir compte de notre emploi des guillemets, pratique qui indique pourtant une prise de distance par rapport à l’affirmation correspondante ? Est-il normal aussi, pour ne prendre que cet exemple, que tu traduises « progrès de l’individualisation », qui signifie seulement progression, développement d’un processus, par l’idée que l’individualisation représenterait pour nous un progrès alors que nous ne nous sommes jamais situés (ni Laurent et moi ni la revue) dans cette perspective en écrivant des centaines de pages sur les rapports individu/communauté ?

La description d’un mouvement ou d’un processus ne vaut pas acquiescement. Une interprétation que tu pratiques souvent comme par exemple quand il fait de la mesure des choses le début d’un processus de quantification parce que cette dernière est le fait d’une puissance de domination. Or, ce n’est pas parce qu’une domination utilise la quantification que toute quantification entraîne ou vise à la domination. À la sortie il est difficile de s’y retrouver : est-ce le procédé de mesure qui est condamnable en lui-même où bien est-ce le fait qu’il soit pratiqué dès les États du premier type pour domestiquer l’espace et les populations ?

De même, on considérerait qu’il n’y a que des forces matérielles assimilables à des forces productives alors que nous restons dans la perspective de Marx des idées comme force matérielle potentielle justement, y compris à l’intérieur de l’activité théorique critique comme nous avons pu le développer dans notre réponse à Dietrich Hoss quant à la prétendue séparation entre théorie et pratique. Tu réintroduis du binaire (c’est ou ça ou ça) alors même que tu en dénonces constamment l’emploi ! Par exemple, page 14 quand tu nous places dans la perspective de la recherche d’une cause première : soit l’imaginaire social, soit le déterminisme ou l’objectivisme alors que ce n’est paas du tout notre perspective puisque nous pensons qu’il y a un jeu de rapports entre différentes « causes » de nature différente. La question reste posée de savoir si effectivement, à un moment donné il n’y a pas prédominance d’un facteur moteur explicatif par rapport à un autre3, ce qui exclut pour nous la mise en avant d’une cause première générale a-historique que constituerait l’imaginaire social.

Ces simplifications que tu effectues virent parfois à la provocation et au travestissement : provocation quand dans ta note 8 tu nous dit qu’il n’y a rien de pire aujourd’hui que l’universalisme avec son cortège d’horreurs ; travestissement quand tu confonds, volontairement ou non, ce que nous appelons à Temps critiques, le processus de totalisation du capital (c’est clair dans les exemples que tu donnes et que nous reconnaissons aussi comme tels) et des principes universels qui participent de l’histoire de l’émancipation même si leur caractère émancipateur ne porte plus forcément et fortement un sens de désaliénation, un dépassement, etc4. Dans le même ordre d’idées, provocation toujours quand tu évoques la critique de la notion de « liberté5» dont plus personne n’oserait parler aujourd’hui alors que nous avons eu de nombreux échanges collectifs avant de sortir notre supplément sur les événements du 6 septembre 2015 et que des centaines de millions de personnes dans le monde luttent quotidiennement pour une liberté qui n’est pas réductible à celle de consommer ou d’avoir internet comme tu sembles le supposer.

Est-ce une question de sens des mots ou encore une simplification mais tu sembles confondre d’une part, individuation (on n’a jamais dit ou sous-entendu qu’il n’y avait pas d’individus dans les sociétés primitives) et individualisation au sens de procès tel que nous le décrivons comme tension historique, sociale et politique entre individu et communauté ; d’autre part tu sembles aussi confondre individualisation et individualisme comme si le procès dont nous parlons s’effectuait sans contradiction, de façon univoque, dans le sens d’une soumission toujours plus grande au « capitalisme connexionniste ». Or ce processus n’a pas de sens unilatéral et est secoué de tensions comme le montrent par exemple les analyses d’H.Lefebvre sur la ville et l’urbain, même si en dernier ressort les affrontements entre forces sociales en rapport avec l’état des forces productives donnent un devenu (le « rurbain » ici dans notre exemple) qui peut apparaître comme le fruit d’un sens déjà déterminé à l’origine.

La même tendance à la simplification ou au travestissement se retrouve à la note 13 où la citation de Marx est taxée sans argumentaire de « mécaniste » alors qu’elle n’est qu’une critique de l’idéalisme philosophique par un matérialisme dont certains aspects tirent vers la théorie du reflet, mais dont d’autres cherchent à sortir de la réflexion binaire. L’usage de citations, d’ailleurs, qu’elles soient de Marx, de Hegel, d’Adorno ou de Castoriadis, ne peut servir de fondement définitif à nos positions. En effet, ces oeuvres sont d’une telle richesse et s’étendent sur une tellement longue période que nous pouvons y piocher à notre guise. Comme dans une auberge espagnole nous pouvons y faire notre marché en fonction de notre approche principale sans que pour cela notre argumentation en sorte renforcée puisque nous savons, au moins dans le cadre du projet de Temps critiques, que ces auteurs ne suffisent pas. Ainsi, quoiqu’on pense de ta citation de Marx, l’invocation incantatoire de « l’imaginaire social » relève plus d’une pratique analogue à celle qui verra Jung invoquer « l’inconscient collectif » par rapport à l’inconscient de Freud, que d’une notion précise permettant la discussion. Une fois dégonflée cette notion pour le moins imprécise mais que tu fais fonctionner comme une cause première (totalisante ?), on peut se poser la question de savoir si, dans la société capitalisée en tout cas puisque c’est quand même ça qui nous intéresse en premier lieu, elle est autre chose ou quelque chose de plus qu’un air du temps6 conditionné par l’échange et la publicité d’idées elles-mêmes référées à un rapport social historiquement situé aussi bien donc du côté des « rapports de production » que du côté des « forces productives » (ce n’est pas un gros mot !). Pourtant, il semblerait que tu veuilles en faire, ne disons pas un « dépassement », tu nous reprocherais notre dialectique, mais une alternative à l’opposition binaire entre conditions objectives et conditions subjectives du matérialisme marxiste.

L’événement est justement ce qui bouscule l’opposition entre déterminé et non déterminé. Il ne s’agit pas de défendre l’un ou l’autre comme dans la discussion sur les conditions objectives et les conditions subjectives de la révolution. Ce qui motive l’activité humaine, c’est d’abord une auto-réflexivité sur son être générique, la possibilité qu’elle a d’être consciente d’elle-même, qui le définit comme être incomplet et dépendant à la naissance puis insatisfait par la suite malgré ou à cause de son absence d’identification complète à son activité y compris dans la passion de cette activité. C’est aussi dans cette incomplétude et cet anti-immédiatisme que s’inscrit un social-historique particulier qui prend la forme de l’aventure humaine.

Ce que tu appelles « pouvoir de création » n’est pour nous, pas autre chose, une fois mis en action, que cette aventure humaine qui repose sur une conscience de soi. Celle-ci consiste à se prendre pour objet et à éviter l’immédiatisme qui ruine toute possibilité de liberté ou d’autonomie. C’est effectivement la posture du Sujet, mais sans la possibilité aujourd’hui, de faire intervenir les anciennes figures historiques du Sujet (le bourgeois, puis les classes, la classe ouvrière).

L’action des forces sociales n’est pas abstraite mais liée à un rapport social, ce que tu reconnais quand tu dis que les forces anti-capitalistes ne peuvent revenir en arrière. Nous en avons pris acte depuis un certain temps comme nous avons pu déjà l’exprimer dans la brochure Les semences hors sol du capital, dans notre critique des idéologies primitivistes, comme dans des remarques (Gzavier et JW) sur les limites d’une perspective en termes de reterritorialisation à partir de l’exemple de Notre Dame des Landes. Si nous avons bien lu ta recension critique de la Lettre à nos amis, il semblerait d’ailleurs que ta position a évolué depuis sur ce point, au moins en ce qui concerne l’aire géographique des puissances dominantes (aux niveaux I et II de la domination pour reprendre les termes que nous employons depuis le n°15 de la revue).

Comme tu as pu le voir puisque cela transparaît dans ta lettre, c’est dans les numéro 2 et 4 que ces aspects ont été développés pour la première fois dans la revue par Ch. Sfar et JW. Mais sans ressentir le moins du monde le besoin de faire surgir dans la réflexion le concept d’imaginaire social car ce que tu nommes ainsi à la suite du Castoriadis tardif, nous le rattachons à une dimension ni matérielle ni idéelle, la généricité de l’homme, à savoir un ensemble de caractères indissolublement naturels-sociaux7 qui ne sont évidemment pas sans effet sur notre … imagination ! D’ailleurs, à la fin de ta partie II tu sembles hésiter sur l’emploi du terme et passer facilement de l’imaginaire à l’imagination. Sur ce point nous te renvoyons aux éclaircissements de J. Guigou quant à la critique du premier terme et à la différenciation qu’il produit d’avec le second.

La même incompréhension entre nous se manifeste quand il s’agit de parler des « Lumières ». Ainsi, cela nous apparaît être un contresens complet de voir, puisque ce sont ici tes deux références, en Adorno et Castoriadis des adversaires des Lumières. Qu’ils en critiquent les limites théoriques ou historiques c’est un fait, donc on pourra toujours trouver des traces dans certaines de leurs citations qui tirent dans ce sens, mais cela n’empêche pas qu’ils y reviennent, Adorno par exemple pour les défendre comme un moindre mal ou une sorte « d’horizon indépassable » face au mouvementisme irrationnel du mouvement étudiant ; Castoriadis en opposant toute la tradition de l’autonomie et de la démocratie qui traverse les différentes pensées de l’Occident chrétien et bourgeois face aux dangers de la religion islamiste (sa version du « choc des civilisations » sans doute). Comme J. Guigou te le faisait remarquer dans une lettre à propos de Castoriadis, tu ne tiens pas assez compte des rapports entre théorie et pratique chez des individus-théoriciens qui ont aussi été, surtout Castoriadis des individus « engagés » ou militants et en tout cas qui ne philosophaient pas en dehors du temps et surtout du temps historique. À partir de là, tu décides par un argument qui ne nous paraît, en l’état actuel de ta présentation, que comme un argument d’autorité, que telle ou telle oeuvre d’Adorno sont majeures ! Tu nous parles « d’années charnières » mais sans nous dire de quoi elles le sont. Cela est d’autant plus brouillé que, toujours aussi rétif à une datation exacte, tu places les Minima Moralia dans les années 1960 alors qu’elles concernent les années 1944 à 1946. Si nous privilégions le temps historique ce n’est pas parce que l’autre temps n’existe pas. Crois-tu vraiment que nous pensions que le temps n’existe pas en dehors de sa conscience comme tu l’exprimes page 8 ? Tu négliges le temps historique parce que ce serait celui des discontinuités partielles, de ce qui finalement n’est pas nécessaire puisqu’il n’y a pas pour toi de « nécessité historique8 ». C’est par exemple ce que s’est mis à penser F. Furet après avoir viré sa cuti stalinienne quand il a énoncé que finalement la révolution française pouvait être considérée comme un non événement qui n’aurait rien changé finalement à l’autre « nécessité », non pas celle du temps historique (un temps devenu trop révolutionnaire aujourd’hui) mais le temps de la longue durée, celui qui aplanit toutes les aspérités et différences. Un discours largement repris par tous les contempteurs de révolutions et particulièrement aujourd’hui par rapport à la révolution française puisque les autres révolutions ne constituent plus des références pour personne.

Si le temps de la longue durée a son importance, il est lui aussi un temps historique formateur de la conscience de soi bourgeoise comme Braudel l’a montré dans ses trois volumes de Civilisation matérielle, économie et capitalisme. La querelle des historiens entre longue durée et événements n’est donc pas en jeu ici puisque nous la pensons dans le même champ de connaissances, malgré les approches différentes. Il en est tout autrement quand la question du temps est posée dans le champ philosophique, qu’elle provienne de Bergson ou d’Heidegger pour ne citer que ceux qui ont fait l’objet d’une attention directe (Bergson) ou indirecte (Heidegger via Adorno et sa Dialectique négative) de ta part..

Si nous privilégions donc le temps historique, c’est parce que c’est celui qui nous intéresse par rapport à des positions et des objectifs que nous pouvons définir comme politiques.

De la même façon que le fait que nous privilégions le temps historique ne nous fait pas oublier l’autre nous ne pensons pas que tes « problèmes » avec le temps historique t’amène à le négliger complètement. Mais, c’est ce qui est grave parce que tu l’utilises à ta guise, selon les besoins en quelque sorte. Ainsi, tu énonces à un certain moment de ton développement que l’histoire n’est pas vraiment « un moteur actif » ; mais à d’autres endroits tu déclare : « l’histoire a montré que ». D’un côté donc l’histoire n’est pas décisive, de l’autre, elle permet de trancher !

Pour en revenir à l’époque actuelle, il nous semble que le développement technologique ne se fait pas au nom des Lumières (et de la Raison avec un grand R) mais en partie contre elles ne serait-ce que parce qu’il ne repose plus sur l’ancienne base du sujet créateur, de la recherche du bonheur par le progrès. Tout cela formait un fonds, certes très idéologique mais assez homogène (embedded aurait dit K. Polanyi) qui a été déconstruit par la révolution du capital et ses nouvelles bases, disons « post-modernes » pour reprendre un terme peu satisfaisant mais qui « parle » quand même à beaucoup.

L’incompréhension à notre égard dont nous parlions plus haut nous semble conduire à nouveau à une simplification extrême quand tu fais de la particularisation mondialisée et de l’universalisation des conditions le signe de la faillite criminelle de l’universalisme ! Tu assimiles l’universalisme à la totalité en en faisant une abstraction qui ne pourrait déboucher que sur une positivation alors que justement l’universalisme « capitalisé » si on peut risquer ce mot est en rupture avec l’universalisme des Lumières, c’est-à-dire un universalisme du sujet, un universalisme certes bourgeois et occidental dans sa conception9 mais qui déborde ce cadre originel par l’extension rapide du modèle aux classes et sa reprise par le mouvement socialiste et la Première Internationale. Or aujourd’hui cet universalisme historique a perdu de son rôle moteur (crise et fin du sujet bourgeois, crise et fin des classes en tant que sujets historiques) et n’est plus porté que par un universalisme abstrait, un universalisme des principes qui ne trouve plus que de rares occasions de s’exprimer comme dans le moment Charlie, dans la lutte autour des sans-papiers … Ce qui vient s’y substituer comme universalisme concret, c’est le particularisme identitaire qui impose ses droits particuliers comme généraux, qui impose sa censure contre les libertés d’expression politiques ou artistiques10. Dans la société capitalisée, les particularismes radicaux tendent à fixer les nouvelles normes parce que comme J. Guigou l’a écrit, les anciennes institutions de l’État-nation sont résorbées et avec elles les anciennes formes de censure religieuse et étatique. Les nouvelles formes, celles liées à L’État-réseau n’apparaissent plus comme l’expression d’une domination extérieure de la part du Léviathan mais comme l’expression du changement (la déconstruction), de l’air du temps (le politiquement correct), de l’unité comme multiple dans l’équivalence.

Quant à nous nous maintenons une exigence d »universalité comme une manifestation de notre généricité11, à travers des luttes historiques et le maintien, tant bien que mal, d’une perspective de communauté humaine12.

Jacques et Laurent, fin septembre 2015.

  1. Cf. une interprétation proférée par J. Coupat à l’encontre de JW dans une présentation publique du livre de Tari sur l’Autonomie italienne à Lyon. []
  2. Certes personne n’y échappe totalement et par exemple tu nous a reproché précédemment l’utilisation d’une citation de la leader du parti des Indigènes de la république qui nous semblait proche de sa position sur un point. []
  3. Cf. la critique de M. Godelier par rapport à Marx sur la question du facteur dominant dans les sociétés pré-capitalistes. []
  4. Cf. toute la discussion sur notre blog à ce sujet. []
  5. Tu sembles lui préférer celle de « libre arbitre » qui correspondrait à ce qui n’est pas réglementé. Mais qu’est-ce qui n’était pas réglementé dans les sociétés primitives ou féodales ? []
  6. C’est ce que ta référence aux nouvelles formes familiales semblent entériner. L’image de la mère ne serait qu’un élément de l’imaginaire social à un moment déterminé, à la limite une métaphore. On peut étendre cela à bien d’autres choses avec la redéfinition des sexes comme genre etc. C’est ce contre quoi nous nous élevons, par exemple dans le livre Rapports à la nature, sexe, genre et capitalisme. []
  7. Cf. les pages 11 à 14 de Rapports à la nature sexe, genre et capitalisme, op.cit qui sont le fruit de discussions entre Laurent et JW. []
  8. Tu comprends « nécessité historique » uniquement au sens où l’entendait une lecture marxiste-léninistes, au sens de la « diamat » et d’une manière générale tu réduis les notions marxiennes à leur usage le plus souvent orthodoxe. C’est ton choix comme on dit, mais il y a d’autres manières de la concevoir quand c’est par exemple l’événement imprévisible de forces sociales qui se mettent en route et convergent fortuitement ou non qui fait advenir la nécessité (nécessité de se nourrir et de s’attaquer aux accapareurs, lutter contre la répression ou des conditions devenues intolérables etc) comme historique. Il ne s’agit pas ici de messianisme prolétarien ou de sens de l’histoire. []
  9. Sans négliger la mesure d’abolition de l’esclavage par la révolution française. []
  10. Cf. l’article de J-Loup Amselle dans Libération du 17/09/2015. []
  11. Certaines hésitations ou incohérences dans nos interventions que tu relèves s’expliquent sans doute par notre différence de cursus entre Laurent et moi à partir pourtant d’une origine théorique commune. Le long retrait qu’a de fait effectué Laurent explique peut être qu’il reste plus ancré sur le discours des années 1970, fortement influencé par le Marx des Manuscrits de 1844. D’où par exemple, ses références assez hégéliano-marxistes sur « l’humanité réalisée » (note de JW qui fait écho à la note 12 de BP et cf. notes à venir à ce sujet de Laurent). []
  12. Cela transparaît d’ailleurs actuellement dans les mouvements de solidarité aux réfugiés et dans la polémique d’apparence sémantique autour des termes de « migrants » et de « réfugiés ». Placer ou replacer l’humanité au centre nous apparaît nécessaire (une nécessité théorique et pratique que tu pourras appeler « historique » si tu le veux) quand les différents courants déconstructivistes, y compris même les plus intéressants, cherchent à la décentrer, à brouiller les frontières entre les espèces comme les frontières entre les sexes d’ailleurs, sans que cela puisse nous ranger parmi les humanistes. De la même façon, si dire que la République française issue de la révolution de 1989 représente un progrès par rapport à l’Ancien régime, cela ne fait pas de nous des « progressistes ». []

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *